En Méditerranée, le cargo veut devenir l’ami du cachalot

NICE – Des bleus, des bosses, parfois pire : le danger constant, pour un cétacé de Méditerranée, d’être heurté par un navire pourrait être limité grâce à un dispositif associant compagnies maritimes et défenseurs de l’environnement marin.

Quelques 10.000 navires commerciaux croisant tous les ans en Méditerranée occidentale, environ 3.500 rorquals et cachalots présents dans le même secteur, combien de possibilités de collisions ?

Beaucoup, si l’on en croit Pascal Mayol, responsable de « Souffleurs d’écume », une association varoise de protection des grands cétacés : « On estime que les collisions représentent la première cause de décès non naturel des grands mammifères marins et sont à l’origine du décès de 16 à 20% des rorquals recensés morts dans ce secteur. Sans compter les centaines de blessés ». Si le choc est traumatisant voire fatal pour les animaux, il ne laisse pas un très bon souvenir non plus aux équipages des navires : « C’était en août 1998 sur une traversée Ajaccio-Nice, un cétacé a heurté le NGV – navire à grande vitesse, ndlr – en pleine mer provoquant une avarie », raconte Frédéric Capoulade, qui commandait ce bateau et collabore aujourd’hui avec l’association. Les atteintes aux personnes restent marginales mais plusieurs blessés ont été recensés aux Canaries et dans les eaux japonaises à la suite de collisions entre baleines et bateaux jet-foil, navires rapides beaucoup plus sensibles à ce type d’aléas que les solides cargos. « Il y a là un enjeu de sécurité et de protection de la biodiversité où convergent l’intérêt des compagnies maritimes et des défenseurs de l’environnement », résume Pascal Mayol. C’est sur la base de cette convergence que son association a commencé à développer des applications visant à limiter les risques de collision.

Par la formation d’abord : depuis 2005, un module pédagogique destiné au personnel de quart et aux élèves officiers est en vigueur à l’Ecole Nationale de la Marine Marchande de Marseille. L’objectif est de donner des outils aux marins pour mieux repérer les cétacés et comprendre leur comportement.

Par l’innovation technologique ensuite : Souffleurs d’écume, associé à l’entreprise toulonnaise Chrisar, met la dernière main à un dispositif de repérage des cétacés en mer qui pourrait totalement changer la donne. « Il s’agit de mutualiser sur un serveur informatique les observations de grands mammifères effectuées en mer par l’équipage des navires et de transmettre leur position à tous les bateaux croisant dans la zone », explique Pascal Mayol.

En quelques clics et quelques secondes, la position du navire, du cétacé, son espèce et le nombre d’individus sont cartographiés et diffusés sur les écrans de tous les navires abonnés au service.

Simple dans son principe, le projet a demandé plusieurs années de développement et est expérimenté depuis le mois de juin par plusieurs bateaux partenaires, dont un de la CMN (Compagnie Méridionale de Navigation). La commercialisation est prévue en 2010 et des contacts prometteurs ont été pris auprès des principales compagnies maritimes méditerranéennes, selon Pascal Mayol. REPCET (REal time Plotting CETaceans) est soutenu par le ministère de l’Environnement. Avec une perspective supplémentaire : « créer, à partir des données REPCET et donc en partenariat avec la navigation commerciale, une gigantesque base de données scientifiques sur les cétacés ».

Source : AFP (9 juillet 2009)

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