Les pêcheurs européens vont pouvoir accroître leurs prises de poissons des grandes profondeurs. Le conseil des ministres européens de la pêche a adopté, jeudi 29 novembre, les quotas de capture des espèces vivant entre 400 et 1 500 mètres de profondeur pour les années 2013 et 2014. Au grand dam des ONG écologistes, les « totaux admissibles de capture » (TAC) ont été largement relevés.

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Les TAC pour le sabre noir et le grenadier de roche de l’Ouest Ecosse, cibles privilégiées des chalutiers français, ont été augmentés respectivement de 40 % et de 69 % en 2013. Celui de lingue bleue sera fixé lors du conseil des ministres de décembre.

Ces décisions sont « conformes aux recommandations scientifiques »,a souligné le ministre français de la pêche, Frédéric Cuvillier, rappelant que le Conseil internationalpour l’exploration de la mer (CIEM) « a constaté, dans ses derniers avis, une amélioration notable de l’état des principaux stocks d’espèces profondes, notamment du grenadier de roche, du sabre noir et de la lingue bleue ».

Ces avis scientifiques sont-ils fiables ? L’ONG Bloom a dénoncé, mercredi 28 novembre, le fait qu’un des scientifiques chargés de conseillerla commission européenne sur ces questions de pêche profonde était employé par la Scapêche, la flotte de pêche d’Intermarché, la plus importante d’Europepour la pêche profonde. La décision a scandalisé les associations de défensede l’environnement. L’ONG Bloom estime que cette pêche accrue va fargiliserdes « espèces caractérisées par leur extrême vulnérabilité, longévité et faible reproductivité »et entraîner « des dommages collatéraux accrus sur les écosystèmes profonds ». Pour les ONG, les données scientifiques sont insuffisantes pour justifierune hausse des quotas de capture.

Les défenseurs de la pêche profonde et ses opposants se livrent depuis des mois une intense bataille. Face à la raréfaction des poissons évoluant plus haut dans la colonne d’eau, la capture des espèces des profondeurs est devenue vitale pour le secteur de la pêche. Problème : la plupart des scientifiques estiment que les cycles reproductifs de ces poissons sont trop longs pour que ces espèces puissent être pêchées de manière à la fois durable et rentable. « La plupart des poissons profonds ont une croissance lente et une durée de vie longue, nous ne pouvons en prélever qu’une très petite fraction chaque année », expliquait Ray Hilborn, professeur à l’université de Washington, dans Le Mondedu 11 septembre. Une modération dont les chalutiers industriels sont bien incapables. 

Conséquence : « Certaines espèces profondes de l’Atlantique du Nord-Est, comme le sabre noir ou la lingue bleue, devraient être considérées comme en danger d’extinction »,affirme Les Watling, professeur à l’université d’Hawaï, à Manoa (Etats-Unis). 

La gestion européenne de la pêche en eaux profondes est « désastreuse »,assénait une étude parue en octobre dans la revue scientifique Ocean & Coastal Management: les quotas fixés sont dans 60 % des cas supérieurs aux recommandations scientifiques – et les captures réelles dépassent largement les quotas. Autres critiques : les chaluts terrassent les talus continentaux, détruisant les écosystèmes des profondeurs. Et pour pêcher les espèces recherchées, les chalutiers capturent involontairement jusqu’à 144 espèces non commercialisées, dont plusieurs variétés de requins menacées, des prises accessoires rejetées mortes à la mer.

Grégoire Allix Source & liens utiles : lemonde.fr (29.11.12)

Source photo : wikimedia.org Actualité récente en rapport :

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