Brouteur des lagons des océans Indien et Pacifique, le Dugong est plus que jamais menacé, d’après une étude française. Consanguinité et isolement en seraient aujourd’hui les causes.

 

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Sirènes

Comment protéger de l’extinction une espèce dans une mauvaise passe, mais qui est déjà protégée ? C’est la question que se pose actuellement l’Agence française des aires marines protégées (de métropole et d’outre-mer ; bientôt fusionnée avec l’Agence française de la biodiversité, qui a rendu son rapport 2015 sur l’état de la population des Dugongs (Dugong dugon) de Nouvelle-Calédonie. Surnommé la « vache de mer », ce mammifère marin exclusivement herbivore est un sirénié, au même titre que les quelques espèces de lamantins (ou Trichéchidés) des eaux douces.

Il est, depuis 2015, considéré comme une espèce menacée « vulnérable » selon l’UICN, (Union Internationale pour la Conservation de la Nature), représentée par environ un millier d’individus seulement, de la côte est Africaine au bord sud-ouest de l’océan Pacifique. Inscrites au patrimoine de l’Unesco en partie pour cela, les zones marines de Polynésie et de Nouvelle-Calédonie accueillent en effet l’une des dernières populations de ces paisibles mangeurs d’algues. La bonne connaissance de sa situation actuelle et la bonne marche à suivre pour sa conservation semblent donc capitales pour protéger au mieux cette espèce.

Consanguinité et isolement, mauvais cocktail pour ces sirènes ?

Dans cette optique, les scientifiques de l’Agence française des aires marines protégées ont procédé aux analyses d’ADNmt (ADN mitochondrial) d’une cinquantaine d’individus, issus aussi bien des lagons de Nouvelle-Calédonie que des eaux marines d’Australie, à quelques kilomètres. Résultat, ils se sont aperçus que les vaches de mer Calédoniennes ne formaient qu’une seule population, à la diversité génétique très faible – c’est-à-dire, dont les individus sont très semblables entre eux, génétiquement. En comparaison, les Dugongs des eaux Australiennes sont répartis en trois populations distinctes, quoique liées par des échanges sporadiques.

A l’inverse, la population de Nouvelle-Calédonie semble très différente de ces dernières, car probablement sans aucun échange ou migration depuis plusieurs générations. Un double-problème donc, de consanguinité et d’isolement géographique, qui démontre une faible résilience de cette population, malgré les mesures de conservation installées depuis quelques années à son égard. Autrement dit, cette population de Dugongs n’arrive pas à reprendre le dessus, après des siècles d’exploitation en tous genres, réduisant significativement son effectif : l’huile, la peau, les os et les dents en ivoire des Dugongs sont très recherchés, particulièrement en Asie pour leurs qualités médicinales supposées.

Ainsi, en 2002, il était rapporté que, même dans des conditions optimales, la croissance de la population n’atteignait pas plus de 5% par an – insuffisant pour lui permettre de remonter la pente. « Il convient donc de maintenir, et même de renforcer, l’effort de conservation ainsi que de continuer à améliorer nos connaissances sur cette population pour assurer au mieux sa préservation future« , insiste l’Agence française des aires marines protégées.

 

Source : Sciences et Avenir, 30.05.2016

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