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Une orque capturée au large des Pays-Bas…

LA HAYE (AFP) – Une orque a été capturée mercredi soir dans la mer des Wadden, au nord-ouest des Pays-Bas, et transportée dans un delphinarium à Harderwijk (centre) pour y être soignée, a-t-on appris jeudi auprès du delphinarium. « L’orque était très faible et maigre, nous avons pris la décision, avec le ministère de l’Environnement, de la capturer pour l’emmener au delphinarium et la soigner », a indiqué à l’AFP Bert van Plateringen, un porte-parole du delphinarium de Harderwijk (centre). « Nous ne savons pas d’où elle vient ni comment elle est arrivée là », a ajouté le porte-parole, précisant que le mammifère marin, noir et blanc, est une jeune femelle d’environ 3,5 mètres de long, pesant environ 400 kilos et âgée d’un à trois ans. L’orque, transportée dans un camion spécialement aménagé, restera dans un bassin du delphinarium jusqu’à ce qu’elle soit en état d’être remise en liberté et de subvenir elle-même à ses besoins, a expliqué M. van Plateringen. Les orques vivent généralement en groupe dans des eaux plus profondes que celles de la mer des Wadden, notamment au large des côtes écossaises et à proximité de Gibraltar, selon Bert van Plateringen. Une orque avait été observée pour la dernière fois dans la mer des Wadden en 1947, selon le ministère néerlandais de l’Environnement. En 1963, une orque morte s’était échouée sur une plage de Noordwijk (ouest), selon la même source.

© 2010 AFP Source : liberation.fr (24.06.10) nu.nl dolfinarium.nl

Photos : destentor.nl

Vidéos de la « capture » avec montage adapté qui omet la capture sensible de la jeune orque au moyen des filets : delfinarium.nl

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Historique des orques captives au delphinarium de Harderwijk

Morgan est la quatrième orque captive du Delphinarium de Harderwijk, et l’unique orque issue d’un sauvetage en Europe. L’établissement n’exhibe plus d’orques depuis 1987, date du transfert de Gudrun, la dernière orque du parc – une femelle capturée en octobre 1976 – vers le Sea World Florida afin de participer au programme américain de reproduction en bassin. Gudrun est morte en février 1996, des suites de complications post-partum après 19 ans passés en captivité. Elle mit au monde une femelle, Taima, en 1991, morte le 7 juin dernier à l’âge prématuré de 19 ans. Le Delphinarium de Harderwijk acheta également deux orques mâles, d’origine sauvage, Tula, qui survécut trois mois de juillet à octobre 1968 et Magnus qui vécut d’octobre à décembre 1977, date de sa mort.

Le sauvetage de Morgan
Il s’agit d’un sauvetage exceptionnel de part le contexte, la situation géographique et l’espèce concernée. Il est très rare qu’une orque s’échoue vivante. Les cétacés les plus communément recueillis vivants appartiennent à des espèces côtières et communes comme le grand dauphin (Tursiops truncatus) ou le marsouin commun (Phocoena phocoena). C’est la première fois qu’une orque est capturée en mer afin d’être secourue en raison de son état de santé critique. Il est nécessaire de rappeler que les orques, comme toutes les espèces de cétacés fréquentant les eaux territoriales européennes, sont strictement protégées et que le Ministère hollandais avait donné son accord pour procéder au prélèvement de l’orque.

La jeune orque femelle, baptisée Morgan par l’équipe du delphinarium, s’est visiblement séparée de son groupe familial et errait désorientée, seule et affamée lorsqu’elle a été aperçu par des pêcheurs. Ces derniers ont informé les autorités qui ont suivi l’orque et établi un rapide bilan de santé. Son état physique critique et ses chances de survie quasiment nulles ont conduit le ministère à autoriser la capture afin de soigner le cétacé au Delphinarium de Harderwijk, établissement habilité pour la réhabilitation de cétacés échoués et en difficulté aux Pays-Bas.

Le 6 décembre 2009, un nouveau-né femelle extrêmement maigre de 2,45 mètres, s’était échoué sur le littoral français ; morte, mais en très bon état de fraîcheur. Ce fait avait été jugé exceptionnel, s’agissant du 5ème cas d’échouage de l’espèce en France, en 30 ans.

La cause de la mort avait été attribuée à la séparation mère-jeune.

(Source : CRMM)

Morgan a été placée dans un bassin de soins de 10 x 25 mètres, équipé de baies vitrées, situé derrière le chapiteau des spectacles, à l’abri du public. L’accès aux baies vitrées est restreint afin de minimiser le stress pour la jeune orque. Bien que visiblement très amaigrie et faible, l’orque a un comportement calme, nageant autour de son bassin, et respire avec régularité. Elle maintient son corps immergé et est alimentée par des harengs et des calmars que les soigneurs lui jettent dans le bassin. Les soigneurs qui suivent Morgan 24/24 heures ne travaillent pas avec les dauphins afin de prévenir tout risque de transmission de pathogènes.

La priorité actuelle de l’équipe vétérinaire du delphinarium est de soigner l’orque, toujours en soins intensifs. Morgan continue de s’alimenter raisonnablement et a survécut à sa troisième nuit, toutefois le pronostic vital reste encore engagé en raison de son état de maigreur et de faiblesse. Les résultats des tests sanguins ont en outre montré des signes d’une infection interne qui est traitée par des antibiotiques. Une dépression immunitaire soudaine pourrait être fatale en dépit des premiers bons résultats obtenus. Que va-t-il arriver à cette orque ? Bien que l’établissement recueille et réhabilite avec succès les marsouins communs (Phocoena phocoena) de la mer du nord échoués ou en difficulté, il est envisageable que cette jeune orque, si elle survit, ne soit jamais libérée. En effet, la structure sociale des orques (Orcinus orca) diffère fortement de celle des petits cétacés et se base sur la vie au sein d’un groupe matriarcal stable autour duquel s’organise la vie des orques : socialisation, communication, déplacements, reproduction et chasse. Le jeune âge de l’orque et la séparation de son clan familial sont deux facteurs qui sont susceptibles d’entraver une éventuelle remise en liberté de l’animal et de remettre en question sa capacité à survivre et subvenir à ses besoins vitaux, seule.

Deux possibilités se présentent si l’orque survit et recouvre la santé :

– L’animal est jugé apte à être remis en liberté :

Si l’animal est relâché, des efforts devront être fournis pour retrouver son groupe d’origine, condition fondamentale pour optimiser ses chances de survie en mer. Cette entreprise ne sera possible que si la population de la mer du Nord fait l’objet d’un suivi et que l’orque ait, par exemple, été préalablement identifiée au sein de son groupe. Ce cas de figure pourrait, par exemple, être plausible pour une population suivie rigoureusement comme celle des résidents de Pugdet Sound aux États-Unis. Néanmoins, d’après les premières informations, aucune donnée ne permet d’établir d’où provient la jeune orque ; l’espèce n’étant que rarement observée en secteur côtier et dans cette région. Des analyses ADN de Morgan permettraient de déterminer le groupe d’origine de l’orque ; s’il est comparé avec celui des orques de la région ayant subi des biopsies ou des autopsies.

– L’animal n’est pas jugé apte à être remis en liberté et restera par conséquent en captivité :

Deux options se présenteront : l’orque restera au Delphinarium de Harderwijk ou sera transférée vers un autre établissement. Ne possédant pas d’orques captives, le Delphinarium de Harderwijk pourrait alors placer Morgan dans un bassin en compagnie de dauphins afin qu’elle ne soit pas seule. Shouka, l’orque née à Antibes et vendue au Six Flags Discovery Kingdom en raison des risques de consanguinité au Marineland, partage actuellement son bassin avec un grand dauphin car l’importation d’une orque mâle en provenance d’Argentine fut rejetée par les autorités. Le Delphinarium de Harderwijk pourrait également créer une nouvelle exhibition en conservant Morgan et en important un mâle afin d’établir un programme de reproduction de l’espèce dans leur établissement. Ce projet exigerait l’obtention des permis nécessaires et un investissement considérable afin de construire des infrastructures adaptées.

La deuxième option, plus probable et plausible, serait de transférer l’orque vers un établissement possédant déjà une ou plusieurs orques captives, afin d’introduire la jeune femelle à un groupe existant et au sein de structures adaptées. En Europe, seuls deux delphinariums possèdent des orques captives : au Marineland d’Antibes, avec 2 mâles et 2 femelles, dont une de souche sauvage et au Loro Parque, aux Iles Canaries, avec 2 mâles et 2 femelles, nés en captivité et importés de SeaWorld aux États-Unis. Si Morgan était transférée en Europe, il est fort probable que le Marineland d’Antibes se propose pour l’accueillir dans sa structure. La jeune orque femelle sauvage serait une acquisition particulièrement intéressante, car elle apporterait des gènes neufs au groupe d’orques du parc, qui ont toutes des liens de parenté et qui augmenterait le potentiel reproductif ; Morgan pouvant librement s’accoupler avec Valentin ou Inouk une fois sexuellement mature. De plus, le Marineland d’Antibes possède l’une des plus grandes infrastructures au monde pour ses orques captives et aurait la capacité d’accueillir une cinquième orque dans ses bassins.

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