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Naufrage du Costa Concordia…

Naufrage : colère en Italie contre les « géants des mers », péril pour le littoral

ROME – Après le naufrage du Costa Concordia, au beau milieu d’une réserve naturelle de l’archipel toscan, la colère enfle en Italie contre les « géants des mers », les paquebots de croisière qui défigurent et mettent en péril le littoral, jusqu’à la lagune de Venise.

L’inquiétude était forte lundi quant aux conséquences pour la faune et la flore locales, de la présence de la masse gigantesque du Costa Concordia à moins de 50 mètres de l’île du Giglio. Le navire renferme plus de 2.000 tonnes de gazole et libère progressivement des tas d’objets de sa coque: réfrigérateurs, meubles, bouts de moquette.

Dans l’onde de choc de la catastrophe, de nombreuses voix s’élevaient pour réclamer un plus grand respect des distances de sécurité voire interdire tout simplement l’entrée de ces colosses hauts comme un immeuble de 10 étages dans les zones les plus fragiles.

« Ca suffit, il faut arrêter de gérer ces navires comme s’il s’agissait de simples vaporetti », ces sortes d’autobus flottants qui circulent dans Venise, a déclaré le ministre de l’Environnement Corrado Clini, en promettant d’agir pour « empêcher ces navires géants de s’approcher de zones sensibles pour l’environnement ».

Dans une interview lundi à La Stampa, il a toutefois souligné que « les règles et limites existent déjà » et qu’il faut surtout « convaincre » les compagnies de les respecter et de ne pas « donner la priorité à l’offre touristique sur l’attention pour la zone traversée ».

Après une réunion de crise en présence de M. Clini, le président de la région Toscane Enrico Rossi a demandé que les grands navires empruntent dorénavant « des autoroutes des mers » et que leur trajet soit « surveillé avec les technologies les plus avancées ».

Trois sénateurs du Parti démocrate (gauche) ont aussi réclamé au gouvernement un « décret d’urgence pour interdire aux navires de croisière et aux pétroliers géants de passer près des lieux sensibles, que ce soit dans la Lagune de Venise, dans les zones marines protégées ou près des petites îles ».

Un comité est né il y a quelques mois pour interdire l’entrée du bassin Saint Marc à Venise aux « géants des mers » qui y font régulièrement escale pour un total de 1,6 millions de passagers par an.

Des manifestations contre les dégâts qui leur sont imputés (érosion des fonds marins, émissions polluantes, vibrations faisant bouger les sédiments) sont programmées tout le mois de janvier à chaque passage de paquebot.

L’association Marevivo a aussi dénoncé la pratique « prouvée et diffuse » consistant à faire passer les bateaux de croisière trop près de la côte « pour créer un effet scénographique aussi bien à bord qu’à terre ».

Marevivo a exigé en particulier que les grands navires soient bannis de zones très fréquentées et sensibles sur le plan environnemental comme « le canal de Piombino, celui du Giglio, le détroit de Bonifaccio (Corse, France) qui font partie en plus du sanctuaire (de protection) des cétacés ».

L’archipel toscan (Elbe, Giglio, Capraia, Montecristo, Pianosa, Giannutri, Gorgone) forme depuis 1996 le plus grand parc marin d’Europe.

« Ce bateau s’était écarté de sa route de 3 milles nautiques (environ 5 km), il voulait peut-être ressentir les frissons des lumières du Giglio à portée de main, du paysage tout proche, on a vu comment ça s’est terminé », a protesté Mario Tozzi, géologue spécialiste de l’environnement et ex-président de ce parc protégé, en soulignant que « tourisme ne peut pas rimer avec inconscience ».

Le commandant du navire Francesco Schettino est accusé d’être passé à quelques centaines de mètres de la côte très rocheuse du Giglio pour faire « l’inchino », la révérence, à un vétéran de sa compagnie armatrice Costa Crociere, ou peut-être pour faire « plaisir » à un responsable des serveurs, originaire du Giglio.

Pour M. Tozzi, il faudrait carrément bannir les super-tankers et les navires de croisière du sanctuaire des cétacés, triangle qui va de la Côte d’Azur à la Corse en passant par le littoral toscan.

En 2010, plus de 850.000 Italiens sont partis en croisière, dont 83% en Méditerranée. Et l’an dernier, les croisières ont attiré 5,4 millions de vacanciers en Europe, plus du double de 2003 (2,6 millions), selon le European Cruise Council (ECC).

Le Costa Concordia, parti de Civitavecchia, près de Rome, devait effectuer une croisière d’une semaine intitulée « Parfum d’agrumes », avec des escales en Italie ainsi qu’à Marseille, Palma de Majorque et Barcelone.

Source :  tempsreel.nouvelobs.com  (16.01.12)    Costa Concordia : l’épave provoque un début de pollution sur l’île du Giglio

ILE DU GIGLIO (Italie) – (AFP) – La petite île italienne du Giglio a commencé à être polluée par les déchets que déverse l’épave du Concordia, échouée le 13 janvier sur sa côte, et dont le retrait constitue « une entreprise cyclopéenne » selon la compagnie propriétaire.

L’agence de protection de l’environnement de Toscane a relevé une concentration de 2 à 3 mg/l de tensio-actifs (substance présente dans les détergents) dans l’eau de mer, contre zéro habituellement.

Ce paradis marin se retrouve ainsi avec un niveau de tensio-actifs similaire à celui de ports industriels comme Marghera près de Venise.

« La situation est encore gérable, mais périlleuse pour une zone qui vit du tourisme et de la pêche », explique à l’AFP Gaetano Benedetto, porte-parole de la branche italienne du Fonds mondial pour la nature (WWF).

Selon lui, il s’agit d’une « pollution concentrée et ponctuelle ». « On ne doit pas tomber dans l’alarmisme, mais attirer l’attention », dit-il.

M. Benedetto est très préoccupé par le devenir de polluants qui empoisonnent l’épave: « Liquides de batteries, substances ignifuges très polluantes, solvants, huiles… »

« On ne dispose d’aucune évaluation précise », déplore-t-il en s’interrogeant: « Quel est le temps nécessaire pour dégager l’épave? ».

Le commissaire en charge de la catastrophe Franco Gabrielli a rappelé mercredi à l’ordre la société propriétaire du navire, qui, en dépit de sa demande, n’a toujours pas présenté de plan de récupération des déchets. « J’imagine que cette demande sera de pure forme et que Costa s’exécutera », a-t-il espéré.

Mais le PDG de Costa Per Luigi Foschi a qualifié d' »entreprise cyclopéenne le retrait de l’épave, qui sera un travail d’une grande complexité ». Des déclarations qui n’incitent pas à l’optimisme.

D’autant que le pompage des réservoirs pleins à rabord du navire n’a toujours pas commencé.

« En se déversant dans la mer, ces 2.380 tonnes de carburant dense et visqueux pourraient avoir un impact non seulement au Giglio mais dans tout l’archipel toscan (qui compte sept îles, dont la plus grande est l’île d’Elbe, NDLR) et sur toute la côte », met en garde Angelo Gentili, chargé du Giglio pour Legambiente, l’une des principales associations italiennes de défense de l’environnement.

« Les meilleurs experts mondiaux sont ici, mais il y a une possibilité de détérioration des conditions météo et d’incidents qui pourraient empêcher de récupérer totalement le carburant lors du pompage qui doit normalement démarrer samedi », estime-t-il. Pour lui, « c’est un risque majeur ».

De son côté, M. Benedetto relève toutefois que dans ce domaine, « la technique utilisée a déjà été expérimentée: des mesures de sécurité sont prévues, le pompage peut être interrompu en cas détérioration des conditions météo… Il s’agit donc d’une modalité de gestion éprouvée ».

D’autant plus que ce processus est limité dans le temps et ne devrait durer que « de 20 à 30 jours », en fonction des divers aléas, précise-t-il.

« L’île du Giglio est un écosystème marin et terrestre unique », observe-t-il. « Dans la phase actuelle, il n’y a pas encore un risque pour la santé, mais pour le tourisme: en cas de fuites importantes dans la mer, il y aura un fort impact négatif ».

Source :  goodplanet.info  (26.01.12) 

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