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Les orgies de poissons mexicains pourraient rendre sourds les dauphins du voisinage

Le cynoscion othonopterus est le poisson le plus bruyant au monde. Du long de son petit mètre, il rivalise avec les baleines.

Au printemps, le delta du fleuve Colorado, dans le golfe de Californie, devient le théâtre d’orgies poissonnières assourdissantes. La période de reproduction fait se rassembler plusieurs millions de poissons, que les scientifiques appellent une «masse de frai». Parmi eux se trouve le cynoscion othonopterus, une espèce d’acoupa, qui s’avère être l’espèce de poisson la plus bruyante au monde, en l’état des connaissances actuelles.

«Les niveaux de son produits par ce choeur de poissons sont suffisamment élevés pour causer une perte d’audition temporaire sinon permanente chez les mammifères marins qui s’attaquent à ce poisson», rapporte Timothy Rowell, chercheur à l’Université de Californie.

Un choeur de poissons aussi bruyant qu’un stade

Phoques, otaries et dauphins pourraient ainsi perdre leur audition à l’entente du bruit produit par la vessie natatoire de l’acoupa du golfe, semblable à celui produit par une mitraillette. L’AFP rapporte ainsi qu’«un seul individu mâle de ce poisson de mer est alors capable de faire presque autant de bruit qu’une baleine alors qu’il mesure moins d’un mètre». Si un seul poisson est capable d’émettre un son de 177 décibels, un choeur entier peut pousser jusqu’à 202 décibels.

Ce bruit se réverbère sur les coques des bateaux de pêche, et peut être entendu jusqu’à la surface de l’eau. Alors que les poissons vont crescendo lors de la marée haute, cela crée une rumeur telle que celle d’un stade rempli de supporters. Rowell suppose que chaque poisson essaye de surpasser en volume son voisin, nageant à la surenchère.

Le chant du cygne

Mais ce cri pourrait bien être le chant du cygne. Alors que les pêcheurs suivent l’acoupa à l’oreille le long du Colorado, l’espèce apparaît de plus en plus menacée. Au cours des cinq à dix dernières années, la taille des poissons a réduit de près de dix centimètres, et l’espèce est classée comme vulnérable par l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) à cause de la surpêche. Lors de la période de reproduction, près de 500 bateaux viennent ainsi pêcher jusqu’à deux millions d’acoupas dans cette zone.

Le nombre de poissons de cette espèce a pu être estimé à partir du bruit produit, et atteindrait les 1,55 million.

Source : Slate – Publié le 20 Décembre 2017
Source photo : Wikimédia Commons

 

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