La diminution du taux d’oxygène dans les océans n’aurait pas pour seule conséquence d’empêcher la faune marine de respirer… Elle l’empêcherait également de voir. Des chercheurs de l’institut océanographique Scripps de San Diego, aux Etats-Unis, ont publié une étude* dont les résultats indiquent que de faibles niveaux d’oxygène dans l’eau de mer pourraient aveugler certains invertébrés marins (mollusques et crustacés).

Une découverte inédite : c’est la première fois que l’on parvient à démontrer que la vision des invertébrés marins est sensible à la quantité d’oxygène disponible dans l’eau (on connaissait déjà le phénomène chez l’homme et les animaux terrestres lié au manque d’oxygène dans l’air). L’analyse des électrorétinogrammes – l’enregistrement de l’activité électrique de la rétine en réponse à une stimulation lumineuse – a montré une diminution de 60 à 100 % de la sensibilité rétinienne à la lumière chez les invertébrés marins évoluant dans un environnement réduit en oxygène. Et ce chez toutes les espèces étudiées : l’encornet de Californie (Doryteuthis opalescens), la pieuvre à deux points (Octopus bimaculatus), la galathée pélagique (Pleuroncodes planipes) et le crabe commun (Metacarcinus gracilis).

La vue, un sens primordial

Privées de vision, ces espèces sont vouées à disparaître. Elles dépendent en effet largement de ce sens pour trouver de la nourriture, se mettre à l’abri et éviter les prédateurs. Tandis que les crustacés possèdent des yeux composés – comme les insectes – leur permettant de détecter facilement les mouvements environnants, les mollusques céphalopodes (pieuvre, seiche) sont dotés d’organes plus complexes qui ne leur permettent pas de distinguer les couleurs mais qui sont très sensibles aux variations de luminosité et de distance.

La désoxygénation des océans qui aveugle les invertébrés est principalement liée à l’augmentation des températures de l’eau, elle-même causée par les émissions de gaz à effet de serre engendrées par l’activité humaine. Ces dernières provoquent également un phénomène d’acidification de l’eau de mer qui modifie les habitats de l’ensemble de la vie aquatique et réduit le taux de survie et de développement des organismes marins, altérant leurs fonctions physiologiques.

Journal of Experimental Biology, 2019.

Source : geo.fr, le 09.05.19
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