Quel animal décroche le titre de la plus grande longévité au monde ? La question est moins aisée qu’il n’y parait et pour cause. Pour y répondre, il faut non seulement dénicher des spécimens à l’âge record mais aussi être capable de déterminer ce dernier avec précision. Pas facile quand la durée de vie des animaux en question atteint quelques centaines d’années…

Aujourd’hui, des chercheurs australiens pensent avoir trouvé une nouvelle méthode pour déterminer la longévité des espèces. Le secret ? L’ADN. Selon leur étude publiée dans la revue Scientific Reports, cette nouvelle technique leur a permis de calculer l’âge maximal de plusieurs animaux. Et de découvrir que certains atteindraient une limite bien plus élevée qu’estimée jusqu’ici.

Parmi eux, la baleine boréale (Balaena mysticetus). Ce cétacé qui évolue dans les eaux arctiques et sub-arctiques détient le record du mammifère à la plus grande longévité. Jusqu’ici, l’âge du plus vieux spécimen connu était estimé à 211 ans. En étudiant son génome, les scientifiques sont toutefois arrivés à une longévité bien supérieure, 268 ans.

L’ADN, miroir de la longévité

L’âge qu’une espèce est capable d’atteindre n’est pas le fruit du hasard. Il est étroitement lié au déclin des fonctions biologiques qui est lui-même dicté en grande partie par notre génome. De précédentes recherches ont ainsi montré que la longévité était influencée par certains gènes mais aussi par certaines modifications intervenant au niveau de notre ADN.

Ces phénomènes ont pour effet de changer l’expression des gènes concernés et, par là-même, de jouer un rôle crucial dans l’âge et le vieillissement d’un organisme. C’est ainsi avec l’une de ces modifications appelées méthylation de l’ADN que les scientifiques du CSIRO (Commonwealth Scientific and Industrial Research Organisation) ont travaillé.

Ils ont étudié les génomes de 252 vertébrés et ont comparé ces données à une base répertoriant des longévités animales connues.

« En utilisant ceci, nous avons constaté que nous pouvions estimer la longévité des espèces en nous intéressant aux endroits où la méthylation de l’ADN se produisait sur 42 gènes particuliers », explique sur le site The Conversation, Benjamin Maine, biologiste qui a dirigé les recherches.

268 ans pour une baleine, 120 ans pour une tortue

En affinant leurs observations, les scientifiques seraient ainsi parvenus à mettre au point une méthode permettant de calculer la durée de vie d’une espèce à partir de son ADN et de sa méthylation.

« Jusqu’ici, il était difficile d’estimer l’âge maximal de la plupart des animaux sauvages, en particulier des espèces de mammifères marins et des poissons qui vivent longtemps », poursuit le spécialiste dans un communiqué.

Désormais, « si le génome d’une espèce est connu, nous pouvons estimer sa longévité », se réjouit-il. C’est à l’aide de cette technique qu’ils ont abouti à un âge maximal 57 ans supérieur pour la baleine boréale. De la même façon, ils ont calculé la durée de vie des tortues de l’île Pinta aux Galapagos à 120 ans. Soit un peu plus que le célèbre spécimen Lonesome George décédé à 112 ans en 2012.

Les chercheurs n’ont toutefois pas travaillé que sur des espèces actuellement en vie. Ils ont également déterminé que le mammouth laineux et le pigeon voyageur, tous deux éteints aujourd’hui, pouvaient sans doute vivre jusqu’à 60 et 28 ans respectivement. Enfin, l’équipe s’est intéressée à notre propre espèce et à certains membres éteints des Hominidés, l’homme de Denisova et Néandertal.

D’après les estimations, les trois ont montré une longévité similaire : 38 ans pour notre espèce et 37,8 pour les deux autres. Bien que cette proximité puisse surprendre, elle rejoint de précédentes recherches anthropologiques menées sur ces ancêtres. A titre de comparaison, l’un de nos plus propres parents, le chimpanzé afficherait lui un âge maximal de 39,7 ans.

« La durée de vie maximale des humains est un sujet controversé », reconnaissent les chercheurs dans leur rapport. Si l’espérance de vie moyenne de notre espèce a plus que doublé au cours des 200 dernières années – elle est de 79 ans aujourd’hui -, ce serait ainsi essentiellement grâce aux progrès de la médecine et à nos changements de mode de vie.

Bien que la méthode présente certaines limites, relèvent les auteurs, elle pourrait ouvrir de nombreuses pistes pour étudier le phénomène du vieillissement. De même que pour en apprendre plus sur la biologie des espèces actuelles et éteintes ou mettre en place des mesures écologiques ou de conservation.

A ce jour, c’est le requin du Groenland qui détient le record de la plus grande longévité chez les vertébrés, avec des spécimens estimés à près de 400 ans.

Source : Geo.fr – Publié le 13.12.19
Photo de une : Wikimedia