La maladie avait déjà fait des dizaines de victimes en 1990. Le morbilivirus a réapparu cet été. Et depuis, les cétacés viennent mourir sur les côtes.
Méditerranée. Ce virus qui fait flipper les dauphins
C’est une sale maladie, avec un sale nom. Morbilivirus, on dirait le patronyme d’un méchant centurion romain dans Astérix. « On note d’abord des problèmes respiratoires qui débouchent sur des pneumonies, des congestions. Il y a aussi des diarrhées, des problèmes neurologiques. Les dauphins ont de plus en plus de mal à respirer. C’est pourquoi on pense qu’ils ont tendance à se rapprocher des côtes, car leurs apnées sont de plus en plus courtes », explique Franck Dhermain, du Groupe d’étude des Cétacés en Méditerranée.
Affaiblis par la maladie, les dauphins maigrissent, et du coup, ne sont plus capables de flotter. Ils coulent, et se noient. On a trouvé une vingtaine de cadavres de dauphins échoués sur les côtes de la Méditerranée depuis le début de l’année 2008. Et une douzaine chaque mois depuis septembre. « En tout, calcule Franck Dhermain, une soixantaine depuis le mois d’août. Et ce qu’il y a de certain, c’est qu’il s’agit bien d’une nouvelle épidémie due au morbilivirus, comme celle d’il y a 17 ans. »
Gare à la pollution
C’est en effet en 1990 que pour la première fois on a détecté cette pathologie chez les cétacés de la Grande bleue. Cent vingt carcasses avaient été retrouvées échouées sur les côtes. L’épidémie avait débuté en Espagne, avant de remonter jusqu’au littoral languedocien, et début 2001, elle avait pris fin sur les côtes de l’Italie. « En 2001, l’épidémie est revenue et elle a fait le tour de l’Italie. L’année suivante, en 2002, elle a sévi autour de la Grèce et dans l’Adriatique. Et en 2004, elle est passée en Mer Noire » poursuit Franck Dhermain.
L’arrivée de nombreux dauphins morts sur les rivages de la Côte d’Azur a beaucoup ému les riverains. « Mais, même si on peut soupçonner le morbilivirus, on ne peut pas être formel, indique de son côté Willy Dabin, du Centre de Recherche sur les Mammifères Marins de La Rochelle. La plupart des cadavres sont arrivés dans un état tel que les analyses qui pourraient confirmer cette présence sont impossibles. »
Et puis, ces dernières semaines, les vents soufflaient vers la côte, ce qui est rare en Méditerranée, ramenant sur les berges des corps qui, d’ordinaire, restent au fond de l’eau. Voilà qui laisse un grand flou pour pouvoir apprécier le réel impact de cette épidémie. « L’espoir, c’est que, si des dauphins meurent à cause de ce virus, d’autres s’immunisent : c’est sans doute pourquoi on n’avait pas vu d’épidémie dans cette région depuis 17 ans, observe Franck Dhermain. En revanche, ce qui est certain, c’est que la Méditerranée est de plus en plus polluée, et que cela affaiblit les défenses naturelles des dauphins. Cela laisse un terrain favorable aux épidémies pour se propager. » Et il est vrai que les malheureux cétacés n’ont pas le plus propre des bassins pour barboter.
Source : LADEPECHE.fr