Les sons que produisent les dauphins sous l’eau nous intriguent depuis longtemps. Aujourd’hui, des chercheurs britanniques et américains ouvrent une nouvelle voie d’étude de ce phénomène, en réalisant les premières images haute définition de ces sons étranges et merveilleux. Ils ont pour cela utilisé un CymaScope, un instrument révolutionnaire qui révèle la structure détaillée des sons.

À partir d’enregistrements audio des mammifères marins, l’équipe de chercheurs a pu représenter visuellement l’architecture des sons. L’ingénieur acoustique britannique John Stuart Reid et le delphinologue américain Jack Kassewitz, qui ont dirigé le projet, appellent ces images des «CymaGlyphes». Ces CymaGlyphes pourraient former la base lexicale du langage des dauphins, où chaque «mot visuel» est représenté par une structure différente.

La plupart des chercheurs considèrent que si certains sons émis par les dauphins représentent un langage, leur complexité constitue cependant une entrave à leur analyse. Les études antérieures visant à visualiser les sons produits par les cétacés (notamment les baleines et les dauphins) ont abouti à des graphiques relativement simples, décrivant la fréquence et l’amplitude.

Le CymaScope enregistre toutes les vibrations de l’environnement naturel des dauphins, permettant pour la première fois de présenter visuellement des détails complexes des sons produits.

D’après les chercheurs qui ont étudié les cétacés, les dauphins « ont acquis la capacité d’extraire des informations dimensionnelles à partir de leurs sons d’écholocation ». L’équipe qui a mis au point le CymaScope fait remarquer que l’appareil visualise les structures dimensionnelles d’un son.

M. Kassewitz, également directeur du projet SpeakDolphin.com en Floride, aux États-Unis, déclare : « Nous ne manquons pas de preuves concernant la capacité des dauphins à ‘voir’ grâce aux sons, un peu comme les hommes utilisent l’échographie à ultrasons pour visualiser un fœtus avant la naissance. Le CymaScope nous donne un aperçu de ce que les dauphins pourraient ‘voir’ à partir des sons qu’ils produisent.»

M. Reid souligne que le son se transmet sous forme de bulles et de faisceaux holographiques, et non comme des ondes, contrairement à ce que pensent la plupart des gens. « Lorsqu’une bulle ou un faisceau interagit avec une membrane, les vibrations sonores s’inscrivent sur elle en formant un CymaGlyphe, une structure répétitive d’énergie. Le CymaScope utilise la surface de l’eau comme membrane, car elle réagit rapidement grâce à la tension superficielle et peut révéler la complexité du son. Une caméra permet d’enregistrer ces détails très fins. »

Selon ces résultats, les divers CymaGlyphes sont similaires à ce que perçoivent les dauphins en recevant l’écho de leurs faisceaux sonores et ceux émis par leurs congénères.

« Cette technique rappelle le déchiffrement des hiéroglyphes égyptiens », déclare M. Reid. « On se souvient que Jean-François Champollion et Thomas Young ont utilisé la pierre de Rosette pour découvrir les éléments de base de l’abécédaire qui a permis de déchiffrer la langue. Les CymaGlyphes que produit le CymaScope sont comparables aux hiéroglyphes inscrits sur la pierre de Rosette. Maintenant que nous pouvons convertir en CymaGlyphes les impulsions, les successions de clics et les sifflements des dauphins, nous disposons d’un excellent outil pour déchiffrer leur signification. »

Suite à ces travaux, M. Kassewitz déclare qu’une série d’expériences sera réalisée afin d’enregistrer les sons produits par des dauphins visant divers objets. « Les dauphins émettent des sons complexes qui dépassent largement notre plage d’audition. Grâce aux progrès récents en matière de techniques d’enregistrement des hautes fréquences, nous pouvons saisir bien plus de détails dans les sons émis par les dauphins. ».

Source : CORDIS

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