Il est 9 h 30, un matin dans la rue Torricelli, Paris, XVIIe arrondissement. À 10 minutes à pied, la place de l’Étoile étrangement calme vient de voir passer le cortège officiel du président sud-africain. La musique de la Garde républicaine range ses instruments. Les embouteillages peuvent reprendre.

Derrière la façade discrète d’un immeuble de type haussmannien qui fait face au siège d’Endemol, la boite de prod’qui a inventé « le Loft » et autres rouleaux compresseurs de la télé-réalité, des créatifs s’installent. Habillés de noir de la tête aux pieds, ils sirotent leur première tasse de café. La journée sera longue devant leurs ordinateurs surpuissants.

De l’eau extraterrestre
Dans le bureau blanc de la société Already Made, Philippe Vidal pose son casque de moto entre deux maquettes de Biarritz Océan, l’une représentant le squelette d’une baleine, l’autre la base sous-marine. Affiché au mur, telle une carte de champ de bataille, un plan XXL illustre le cheminement de la future exposition permanente de la Cité de l’océan. Un parcours ludo-didactique dont ce professionnel de la culture et de la muséographie a supervisé la conception depuis deux ans avec le scénographe Yves Ollier. Ce dernier ne tarde pas à pousser la porte du bureau avec Marie Potvin, collaboratrice qui a notamment réalisé les maquettes. « Cette exposition de la Cité de l’océan est un travail collectif qui a débuté avec le comité de pilotage scientifique dans lequel on retrouve en particulier l’Ifremer et l’Université de Bordeaux 2. Mon premier boulot a été de vulgariser les informations qu’ils m’ont communiquées. Ils ne se rendaient pas toujours compte des trésors qu’ils détenaient. Pour eux par exemple, l’origine extraterrestre de l’eau de mer est quelque chose d’évident et de banal. Pour nous, c’était le point de départ d’une aventure partagée avec le public. »
 squelette baleine-(C) photo-depot_com.jpgCréateur pluridisciplinaire et personnage non conformiste, Philippe Vidal écrit de la poésie et des livres d’histoire et réalise de la mise en scène théâtrale. Après cette phase d’écriture et de scénarisation sur l’océan présenté comme un être vivant, sa validation par la Ville de Biarritz, il a été chargé de donner corps à un ensemble qui se veut interactif et ludique.

Pour passer du rêve à la réalité, il faut désormais coordonner les équipes qui œuvrent dans l’ombre des bureaux de la rue Torricelli, comme dans d’autres endroits de Paris et de sa banlieue, mais aussi à Bordeaux.

Il est 10 heures. Philippe Vidal, Yves Ollier, Marie Potvin ont rendez-vous avec Franck Marchal, Sophie Michard, Christine Ye et les collaborateurs de Vision Intégrale. Tout le monde s’installe dans une salle de visionnage.

Pendant plus d’une heure, les professionnels vont valider les films courts qui seront présentés au public lors des expériences. Le fil conducteur est une sorte de Professeur Nimbus pittoresque qui explique avec des mots simples et des formules chocs, les secrets de l’océan. Tout est prouvé scientifiquement, validé par le comité de pilotage. Chaque mot, chaque détail compte.

Philippe Vidal ne laisse rien passer. Franck Marchal et ses collaboratrices prennent note pour les corrections, avant l’enregistrement des textes définitifs avec des comédiens professionnels, qui seront à nouveau passés au scalpel.

« Le but de ces films est de distraire les gens en les cultivant. Qu’ils puissent retenir des informations mais sans être assommés. Une exposition doit permettre de faire vivre une émotion », explique Philippe Vidal.

11 heures. Après avoir donné les dernières consignes à un sound-designer pour réaliser la bande-son des films qui accompagneront la revue des principaux mythes liés aux océans (déluge, triangle des Bermudes, mer des Sargasses, Atlantide), l’équipe d’Already Made descend quelques marches pour rencontrer Lionel Fage, Julien Stiegler et Nicolas Deveaux de Cube creative computer company. La production du film du bathyscaphe est en plein rush.

Composé comme un tableau avec un empilement de couches successives de couleurs et d’images numériques, ce film en relief n’a pas encore de bande-son. Les équipes font un point. « Nos comédiens sont cette fois virtuels, avec un poulpe, un phoque et un poisson-lune », s’amuse Philippe Vidal.

Le casse-tête des décors
Mais Biarritz Océan, ce ne sont pas que des films, des programmes et contenus interactifs qui seront amenés à évoluer en permanence. Il y a aussi toute la partie scénographie, décors. En début d’après-midi, Yves Ollier prend la direction de la proche banlieue avec Marie Potvin, pour y suivre la fabrication du fameux bathyscaphe.

Première halte chez Plastic Studio à Montreuil. Dans d’anciens ateliers d’ébénisterie, Bernard Bourdeu et ses artistes, spécialistes des décors, mettent la dernière main à plusieurs éléments clefs du parcours de la Cité de l’océan. Romain sculpte ainsi les bustes des personnages historiques, qui expliqueront aux visiteurs les mythes océaniques.

Dans un immense hangar de Bagnolet, annexe de Plastic Studio, des équipes réalisent avec de la résine, du bois, de l’acier, le corps du bathyscaphe. C’est dans ce même atelier que la base sous-marine a déjà été construite de A à Z avant d’être démontée et transportée à Biarritz. Les équipes sont dans les temps mais ne perdent pas une seconde. Le prochain chantier est déjà commencé, la fabrication d’un squelette géant de baleine, dont la maquette vient d’arriver.

Source : sudouest.fr   (10.03.11)    

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