Plus qu’un événement, « une bénédiction ». Au  Centre de recherche sur les baleines de l’Etat de Washington , aux Etats-Unis, la découverte d’un orque âgé de quelques jours dans les eaux canadiennes a été saluée comme un cadeau du ciel. Le 30 décembre, des biologistes du centre ont pu observer et photographier le petit animal – tout de même 2,50 m et environ 200 kg – nageant au côté de sa mère, au large des North Pender Island, en Colombie britannique. Ils l’ont immédiatement baptisé J-50 (J constituant le nom de son groupe). « Une façon formidable de finir une année difficile », a souligné le biologiste Howard Garrett, qui suit depuis trente ans cette population navigant entre le Canada et les Etats-Unis.

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Ces derniers mois, les scientifiques qui observent la petite colonie de 78 individus avaient en effet enregistré plusieurs tristes nouvelles. En septembre, L-120, le premier-né de 2014, avait été officiellement déclaré manquant, à peine deux mois après sa naissance. Puis ce fut J-32, alias Rhapsody, une femelle de 19 ans, qui fut retrouvée morte début décembre, au large de Vancouver. Elle portait dans son ventre un nourrisson pratiquement à terme. Enfin Lulu (L-53), une femelle de 37 ans, et Indigo (L-100), un mâle de 13 ans, ont disparu du golfe à leur tour, vraisemblablement morts durant l’été.

Petit fuyard

Autant dire que cette dernière naissance a provoqué « excitation et espoir », selon les déclarations au site Full Time Whistle de Ken Balcomb, fondateur du Centre et premier à avoir vu l’animal. Sur sa page Facebook, l’établissement a publié les premières images et une vidéo ( voir ici ) « Ce n’est qu’ensuite que nous avons compris que cet espoir risquait d’être terni. » Au cours des trois journées suivantes, l’équipe de Ken Balcomb a suivi de près les deux mammifères marins. Et découvert des éléments troublants. Le nouveau-né avait une curieuse tendance à s’éloigner de sa mère. A plusieurs reprises, les biologistes ont même vu d’autres cétacés jouer les bergers pour reconduire le petit fuyard auprès de l’aînée. Les bébés orques, nourris par leur mère pendant un an, sont pourtant réputés ne jamais quitter celle-ci des yeux au cours du premier mois. En agrandissant les photos du petit, les biologistes ont aussi observé des marques sur sa nageoire dorsale, comme celles laissées par des dents de congénères. D’où provenaient-elles ?

En outre, il y a les caractéristiques de la mère : bien connue des naturalistes, J-16 a dépassé les 42 ans, un âge où les orques ne sont plus supposées enfanter. Il y a seize ans, la dame avait déjà donné naissance à J-36, une femelle que Ken Balcomb et son équipe n’ont plus observée dans les parages ces derniers temps. Lors des naissances, les familles ont pourtant l’habitude de se regrouper pour protéger les derniers-nés…

Accouchement difficile

C’est là que Balcomb a assemblé le puzzle et dégagé un nouveau scénario, moins gai celui-là. J-16 ne serait pas la mère mais… la grand-mère de J-50. La mère, J-36, en pleine force de l’âge, aurait souffert d’un accouchement difficile après les 17 mois habituels de grossesse. Le petit aurait été sorti du ventre de sa génitrice grâce à l’aide d’un autre animal, opérant avec ses dents. Deux possibilités se présentent alors : au mieux, la mère a confié le petit à la grand-mère et « se repose », espère Balcomb. « Au pire, nous avons affaire à un nouveau cas de mort d’une mère pendant l’accouchement », poursuit-il.

Dans le second cas, le petit cétacé est condamné, faute de lait. Dans le premier, et si la mère revient vite, il lui faudra encore surmonter les embûches que rencontrent tous ses congénères, à commencer par le manque de saumon royal, qui constitue 95 % de la nourriture des orques. En temps normal, un petit sur deux meurt au cours de la première année. Depuis 2005 et l’inscription des orques du Pacifique nord sur la liste des espèces menacées, la population n’a fait que diminuer. Pour J-50, l’avenir n’est pas tout à fait radieux.

Source :  lemonde.fr (05.01.14)

Source photo :  wikimedia.org 


Plus d’infos sur l’espèce & fiche pédagogique téléchargeable :

L’orque


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