Par Julie Labille, Militante C’est Assez !
Chaque année, une chasse au rabattage cruelle se déroule à Taiji, une petite ville japonaise. Elle tue des centaines voire des milliers de dauphins durant la saison qui commence le 1er septembre et dure 6 mois environ. Un business très lucratif qui permet de fournir les delphinariums en « sang neuf », dénonce Julie Labille de l’association C’est assez !
La petite ville de Taiji est située dans la préfecture de Wakayama au Japon. Chaque année, une chasse au rabattage cruelle s’y déroule et tue des centaines voire des milliers de dauphins durant la saison qui commence le 1er septembre et dure 6 mois environ.
Une chasse cruelle au nom de la « tradition »
La chasse au rabattage de dauphins à Taiji a été rendue tristement célèbre par le film The Cove, La Baie de la honte, Oscar du meilleur film documentaire en 2010. Ce dernier a permis d’attirer l’attention de l’opinion mondiale sur ces pratiques. Distribué en France par Luc Besson, il met en scène Richard O’Barry, ancien dresseur de Flipper et militant depuis plus de 40 ans pour la liberté des cétacés et démontre les liens étroits entre les massacres de dauphins et l’industrie de la captivité.
Dès lors, le Japon doit faire face aux accusations d’associations de défense des animaux et de personnalités parmi lesquelles Maisie Williams, alias Arya Stark dans la célèbre série Game of Thrones, mais cette pratique barbare est défendue sous couvert de « culture » et de « tradition ». Or, cette chasse s’est développée à partir de 1969, bien loin des traditions séculaires qui font la richesse culturelle du Japon.
Ric O’ Barry, 76 ans, fut brutalement arrêté et emprisonné pendant 19 jours lors de la saison 2015/2016. Après s’être rendu 14 années de suite à Taiji, il est désormais interdit de séjour.
Comment se déroule la chasse
De septembre à mars, les pêcheurs partent en mer à la recherche de dauphins. Une fois un groupe repéré, les bateaux se positionnent et forment un « entonnoir ». Les pêcheurs effraient ensuite les cétacés en tapant la surface de l’eau avec de longues barres de métal, formant ainsi un « mur de bruit ». Il ne leur reste plus qu’à rabattre les animaux affolés dans les eaux peu profondes de la baie où des filets sont installés pour les empêcher de fuir.
En 2010, les pêcheurs de Taiji ont annoncé avoir changé leurs méthodes d’abattage. Jusque-là, les dauphins étaient harponnés et poignardés jusqu’à la mort. A présent, ils détruisent la moelle épinière des cétacés qu’ils transpercent à l’aide une tige métallique. Or, les pêcheurs peinent à atteindre la moelle épinière du premier coup et les dauphins restent conscients tout au long de leur agonie. Ils voient les leurs se faire massacrer devant eux et comprennent parfaitement ce qui se passe.
Quelle est la raison de cette pratique ?
Elle est double.
Les plus « beaux » spécimens sont conservés pour être dressés puis revendus aux delphinariums ; un dauphin dressé se revend environ 130 000 €. La base de données la plus complète sur les cétacés captifs, Ceta-Base, a pu répertorier les delphinariums qui se sont fournis à Taiji. En 2014, cela concernait 20 pays : le Bahreïn, la Chine, l’Egypte, la République de Géorgie, l’Iran, le Japon, la Corée du Sud, le Mexique, la République des Palaos, les Philippines, la Russie, l’Arabie Saoudite, Taïwan, la Thaïlande, la Tunisie, la Turquie, l’Ukraine, les Emirats Arabes Unis, les Etats-Unis et le Vietnam.
En avril 2015, l’association mondiale des zoos et des aquariums (Waza) a décidé de suspendre l’Association nippone des zoos et aquariums (Jaza), accusée de s’être procuré des dauphins en provenance de Taiji. Déclarant avoir « violé le code éthique de la Waza ainsi que le bien-être des animaux », la Waza a également demandé à « tous ses membres d’adhérer à sa politique consistant à ne pas participer à des méthodes cruelles et non sélectives de capture d’animaux sauvages ».
Les autres dauphins rabattus seront pour la plupart massacrés sous de grandes bâches à l’abri des regards. La viande est ainsi revendue aux supermarchés, aux restaurants et même aux cantines scolaires (un dauphin de boucherie rapporte environ 450 €). Or, et comme le montre aussi le film « The Cove », des analyses ont mis en évidence la toxicité de la viande de dauphin car elle contient des taux de métaux lourds (notamment du mercure) très élevés.
Les quotas pour la saison 2016/2017
Les autorités de Taiji fixent chaque année des quotas de pêche. Pour la saison 2016/2017, pas moins de 1820 individus ont été comptabilisés. Ainsi, 450 dauphins bleus et blancs, 414 grands dauphins, 400 dauphins tachetés, 251 dauphins de Risso, 134 dauphins à flancs blancs, 101 globicéphales et 70 pseudorques devraient être les victimes de cette chasse sanglante et impitoyable.
Pourquoi donc poursuivre ces massacres ? Certainement parce qu’il s’agit d’un business très lucratif qui permet de fournir les delphinariums en « sang neuf » et renouveler ainsi le patrimoine génétique des dauphins captifs.
Il est donc primordial de ne pas acheter de ticket pour les delphinariums. Il en va de la vie de milliers d’individus sensibles, intelligents et sociaux qui se font massacrer sous les yeux de leur famille, et de la vie des dauphins captifs qui souffrent chaque jour un peu plus de leurs conditions de vie.
Le Népal a mis fin au plus grand massacre animalier au monde en 2015, perpétré jusqu’alors au nom de la tradition. Il est temps que le Japon suive la même voie.
Source : leplus.nouvelobs.com, le 31/08/2016
Photo : Capture de dauphins dans la baie de Taiji, au Japon (Sea Shepherd)