Entre huit et 40 rorquals communs décéderaient chaque année en Méditerranée après avoir percuté un bateau, selon les estimations de WWF. Les collisions avec les ferries de plus de 200 mètres seraient même la première cause de mortalité non naturelle chez les grands cétacés, à savoir les cachalots et les rorquals communs.

La situation a préoccupé jusqu’aux plus hautes sphères de l’Etat. Ces bateaux traversent en effet une zone protégée et particulièrement fréquentée par les cétacés : le Sanctuaire Pelagos, au large de la Côte d’Azur, de la Corse et de l’Italie. Or, le trafic maritime dans cette zone ne cesse de s’accroître.

Une obligation légale

Aussi, en août 2016, l’ancienne ministre de l’Environnement Ségolène Royal intègre un décret spécifique dans sa loi biodiversité. Désormais, les navires de plus de 24 mètres battant pavillon français et ayant circulé plus de dix fois dans cette zone protégée ont obligation de se doter d’un dispositif anti-collision. Entre 60 à 80 navires français sont concernés.

Entré en vigueur en juillet dernier, ce décret engendre une petite révolution chez les compagnies qui assurent la traversée entre la Corse et le Continent. Dans les cabines des ferries de La Méridionale et de Corsica Linea, un logiciel se répand de plus en plus. Baptisé Repcet pour Real time of Plotting of Cetacean, ce système a été développé par l’association varoise Souffleur d’écume et la société Ar-Consulting, et coûte à chaque compagnie 3.600 euros par an.

Information en temps réel

Le principe ? Dès qu’un animal est repéré par l’officier en passerelle, ce dernier indique l’information sur le logiciel qui la partage en temps réel avec les autres bateaux équipés grâce à la localisation GPS. « Nous avons mené une étude comportementale, explique Marion Leclerc, chargée de communication auprès de l’association Les Souffleurs d’écume. Quand l’officier en passerelle signale la présence d’un animal, un point apparaît sur la carte, ainsi qu’un autre cercle rouge qui correspond à la zone de danger. »


« On peut éviter ces morts en repérant ces cétacés, car il est difficile de manœuvrer de si gros bateaux si on repère au dernier moment », abonde Joséphine Chazot, chargée de mission au sein de l’association.

Reste à convaincre l’Italie

La démarche repose ainsi en grosse partie sur la vigilance et la bonne volonté du personnel à bord. Les Souffleurs d’écume ont dans ce but mis au point un guide pour repérer les différents cétacés, en fonction notamment de la queue et du souffle. « Le système a deux limites, concède Denis Ody, responsable océans et côtes au WWF France. Il ne fonctionne pas la nuit et il est basé sur l’observation. Il faut donc continuer les recherches technologiques. » Et de se réjouir : « Il faut aussi que les équipages soient motivés, et c’est généralement le cas. »

Reste désormais à convaincre les compagnies italiennes d’imiter leurs concurrentes françaises. Récemment, Corsica Ferries a décidé, à son tour, d’équiper quatre de ces navires du dispositif Repcet. « Il faut s’emparer de cette problématique, appelle Pierre Mattei, PDG de Corsica Ferries. Il est important de tous nous mobiliser pour la préservation du milieu marin. » En effet, si l’on en croit Denis Ody de WWF, les choses avancent doucement chez nos voisins transalpins, pourtant tout aussi concernés par ce phénomène.

Source : 20 minutes – Publié le 19 Septembre 2017
Photo de une : Clément Prandi
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