Pour éviter à l’eau chaude de l’océan de faire fondre les glaces, des chercheurs proposent une solution simple et prometteuse : bloquer cette eau avec des barrières.

Avec le réchauffement climatique, les calottes glacières des pôles fondent, ce qui provoque en grande partie l’augmentation du niveau de la mer.

Si le réchauffement climatique atteint 2° C de plus que les températures préindustrielles (ce que tente d’éviter l’accord de Paris), le niveau de la mer augmenterait tellement que 280 millions de personnes devraient déménager. Des grandes villes comme Hong Kong, Calcutta, Rio de Janeiro et New York sont en première ligne.

Or, c’est moins le réchauffement de l’atmosphère que celui de la mer qui fait fondre les glaciers. « L’eau chaude de l’océan érode la glace par en-dessous », explique Michael Wolovick, chercheur en sciences de l’océan et de l’atmosphère à l’université de Princeton (États-Unis). Près des pôles, l’eau plus chaude se trouve au fond de l’océan, et l’eau froide au-dessus. Le dessous du glacier se retrouve en contact direct avec cette eau plus chaude, et fond.

Des murs de roche, de gravier et de sable

Michael Wolovick et d’autres spécialistes du changement climatique ont eu une idée assez simple pour ralentir la fonte des glaces : construire un mur devant les glaciers au fond de l’océan pour empêcher l’eau chaude d’atteindre le glacier, ou construire des « points d’ancrage », des murs isolés à des endroits stratégiques. Ces murs de 300 mètres seraient composés d’agrégats de roche, de gravier et de sable.

À l’aide de modèles informatiques, ils ont étudié l’impact sur le glacier Thwaites, dans l’Antarctique occidental, qui devrait être la plus grande source d’élévation future du niveau de la mer. Avec des résultats encourageants.

« Les points d’ancrage – la solution la moins chère envisagée – ont réussi à ralentir de 30 % le taux d’effondrement du glacier, sans réussir à inverser l’effondrement », explique Michael Wolovick. « De plus grandes conceptions, qui sont au-delà de l’échelle des plus grands projets de génie civil que l’humanité a tentés, ont été en mesure d’inverser l’effondrement. »

Si cette idée peut paraître folle à première vue, d’autres grands projets de génie civil ont déjà eu lieu sur Terre. Percer le canal de Panama ? Déjà fait. Construire une île artificielle pour accueillir l’aéroport d’Hong Kong ? Déjà fait. Drainer de l’eau sous un glacier norvégien pour alimenter une centrale hydroélectrique ? Déjà fait. Seul l’environnement polaire, difficile d’accès et inhospitalier, poserait des défis supplémentaires et inédits.

La mise en place de ce projet coûterait entre 10 et 100 milliards d’euros. C’est moins que les conséquences qu’aurait une montée des eaux incontrôlée, avec l’évacuation des millions de réfugiés climatiques.

Les scientifiques ne plaident pas pour une construction en urgence, mais pour « que la communauté scientifique entame un processus d’amélioration des conceptions afin que nous ayons quelque chose de prêt lorsque cela sera vraiment nécessaire ».

Les chercheurs le savent, cette solution n’est aucunement une solution définitive au problème de la fonte des glaces, et plus globalement, à celui du réchauffement climatique.

« La géoingénierie glaciaire ne remplace pas la réduction des émissions de gaz à effet de serre », assure Michael Wolovick. « Notre projet pourrait prévenir l’une des plus grandes causes de l’élévation du niveau de la mer, mais il n’atténuera pas le réchauffement planétaire causé par les gaz à effet de serre. Nous ne pourrons pas sauver les calottes glaciaires à long terme si le climat continue de se réchauffer. »

Source : Ouest-France – Publié le 26 septembre 2018
Photo de une : Pixabay

 

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