De 1970 à 2014, le nombre de vertébrés sauvages (mammifères, poissons, oiseaux, reptiles, amphibiens) s’est effondré de 60%, alerte WWF.
Mammifères, oiseaux, poissons… sous la pression de l’homme, la Terre a vu ses populations de vertébrés sauvages décliner de 60% entre 1970 et 2014, dénonce le Fonds mondial pour la nature (WWF) dans un bilan encore plus alarmant que le précédent.
« Préserver la nature ce n’est pas juste protéger les tigres, pandas, baleines, que nous chérissons », souligne le directeur du WWF, Marco Lambertini. « C’est bien plus vaste : il ne peut y avoir de futur sain et prospère pour les hommes sur une planète au climat déstabilisé, aux océans épuisés, au sol dégradé et aux forêts vidées, une planète dépouillée de sa biodiversité ».
🍃 Le constat du #RapportPlanèteVivante 2018 est alarmant : 60 % des effectifs de vertébrés sauvages a disparu en moins de 50 ans → https://t.co/zrDKD2AEYa
Reprenons le contrôle et inversons la tendance maintenant, il n’est pas trop tard ! ✊ #PlanèteVivante #LPR2018 pic.twitter.com/2Ozqieq8sZ— WWF France (@WWFFrance) 30 octobre 2018
Le WWF, créé en 1961, suit le déclin accéléré des populations animales sur Terre. Tous les deux ans, l’ONG publie un rapport « Planète vivante ». Voici les cinq grandes conclusions de la dernière édition, à laquelle ont contribué une cinquantaine d’experts et qui reprend aussi de grandes études scientifiques publiées sur le sujet.
1. Les effectifs de vertébrés s’effondrent
De 1970 à 2014, le nombre de vertébrés sauvages – mammifères, poissons, oiseaux, reptiles, amphibiens – s’est effondré de 60%. Le déclin des animaux d’eau douce atteint même 83%, en raison de la surexploitation, parfois involontaire comme pour les dauphins de rivière (prises accidentelles en filets), et de la perte des habitats.
Globalement la dégradation des habitats représente la menace la plus signalée.
Le rapport est basé sur le suivi de plus de 16.700 populations (4.000 espèces) : recensements par caméras (tapirs du Costa Rica, tigres en Inde), suivis des traces (lynx de Russie), programmes de recherche ou sciences participatives… Par exemple, la population d’éléphants dans les zones de Selous et Mikumi, en Tanzanie, a diminué de 66% entre 2009 et 2014. Depuis 1976, l’espèce a subi un déclin de 86%, en premier lieu en raison du braconnage.
2. De nombreuses espèces en voie de disparition
L’index d’extinction montre une très forte accélération pour cinq grands groupes : oiseaux, mammifères, amphibiens, coraux et cycadales, un ordre de plantes anciennes.
De manière générale, le taux d’extinction des espèces est de 100 à 1.000 fois supérieur à ce qu’il était avant que les activités humaines ne commencent à altérer la biologie et la chimie terrestres.
Ce qui, pour les scientifiques, signifie qu’une extinction de masse est en cours, la sixième seulement en 500 millions d’années.
3. Les « limites planétaires » sont atteintes
En 2009, les scientifiques ont mesuré l’impact des besoins croissants de l’humanité sur les « systèmes terrestres ». Ces derniers ont un seuil critique au-delà duquel le monde entre dans une zone périlleuse. Pour le climat, ce seuil est +1,5°C de réchauffement (par rapport au niveau pré-industriel), ont souligné les experts climat de l’ONU en octobre.
A ce stade, nous avons déjà franchi deux autres « limites planétaires », avec les pertes d’espèces et le déséquilibre des cycles de l’azote et du phosphore (résultant de l’usage d’engrais et de l’élevage intensif). Pour la dégradation des sols, l’alerte est au rouge. L’acidification de l’océan et la ressource en eau douce n’en sont pas loin.
Quant aux polluants chimiques, de type perturbateurs endocriniens, métaux lourds et plastiques, nous ne savons pas encore quel est le seuil critique. Les technologies et une meilleure gestion des sols ont légèrement amélioré la capacité de renouvellement des écosystèmes, note le WWF, mais cela n’a pas compensé l’empreinte écologique de l’homme, trois fois plus marquée depuis cinquante ans.
4. Nos forêts sont en déclin
Au Brésil, qui vient d’élire un président dont le programme n’évoque ni la déforestation ni le réchauffement (et qui souhaite mettre des conditions à l’Accord de Paris), la forêt amazonienne rétrécit toujours plus, comme la savane du Cerrado, au profit du soja et de l’élevage bovin. Près de 20% de la forêt amazonienne, la plus grande du monde, a disparu en cinquante ans. Dans le monde, les forêts tropicales continuent de reculer, principalement sous la pression des industries du soja, de l’huile de palme et de l’élevage.
Mondialement, seuls 25% des sols sont exempts de l’empreinte de l’homme ; en 2050 ce ne sera plus que 10%, selon les scientifiques de l’IPBES (le « Giec de la biodiversité »). Entre 2000 et 2014, le monde a perdu 920.000 km2 de forêts intactes, une surface quasi égale à la France et l’Allemagne réunies. Selon des données satellitaires, ce rythme a crû de 20% de 2014 à 2016 par rapport aux quinze dernières années.
5. Nos océans s’épuisent
Depuis 1950, plus de 6 milliards de tonnes de produits de la mer ont été pêchées. Devant l’effondrement du stock, les prises ont atteint leur maximum en 1996, et déclinent doucement depuis.
« Nous sommes la première génération à avoir une vision claire de la valeur de la nature et de notre impact sur elle. Nous pourrions aussi être la dernière à pouvoir inverser la tendance », prévient le WWF, qui appelle à agir d’ici 2020, « un moment décisif dans l’histoire », « une fenêtre sans précédent qui se refermera vite ».
Source : L’Obs – Publié le 30 octobre 2018
Photo de une : Pixabay