Plus de vingt ans après la création du parc marin du Saguenay–Saint-Laurent, une nouvelle grande aire de protection marine vient d’être officialisée en eaux québécoises, cette fois à l’est de la péninsule Gaspésienne : le Banc-des-Américains. Mais le Québec est toujours loin de son objectif de protéger 10 % de ses milieux marins d’ici 2020, puisque ce taux atteint à peine 1,9 % à l’heure actuelle.
Le gouvernement fédéral a publié mercredi dans la Gazette du Canada les règles de protection qui s’appliqueront pour cette zone de 1000 km² qui forme un quadrilatère situé au large de la Gaspésie. La limite nord se situe à la pointe du parc Forillon et la limite sud est tout juste à l’est de l’île Bonaventure.
De façon générale, le gouvernement du Canada et celui du Québec collaboreront afin d’y interdire toute activité « qui perturbe, endommage, détruit ou retire de la zone de protection marine tout organisme marin vivant ou toute partie de son habitat, ou qui est susceptible de le faire ». Certaines pêches commerciales continueront toutefois d’y être autorisées, ainsi que la navigation commerciale, mais tout en étant plus encadrées.
Biodiversité marine
Ce secteur du golfe du Saint-Laurent revêt une grande importance biologique pour l’écosystème du Saint-Laurent. Selon la description qu’en fait Pêches et Océans Canada, ce milieu « est caractérisé par la diversité de ses habitats, par la présence permanente ou saisonnière de nombreuses espèces à valeur commerciale et de baleines, par la présence d’espèces en péril et par une grande diversité de mollusques et de crustacés ».
On y observe notamment une quinzaine d’espèces de cétacés, dont le rorqual bleu et la baleine noire, deux espèces classées « en voie de disparition ». La zone de protection marine est donc conçue « pour protéger les habitats des fonds marins et les espèces fourragères, et pour faciliter le rétablissement de certaines espèces en péril, en particulier le rorqual bleu, le loup tacheté et le loup à tête large », a indiqué le fédéral par voie de communiqué. C’est aussi le cas du stock de morues du sud du golfe.
La Société pour la nature et les parcs (SNAP Québec) a salué cette annonce mercredi, soulignant que la mise en place de la zone de protection marine (ZPM) du Banc-des-Américains est « le résultat de plusieurs années de consultation et de concertation entre divers acteurs ».
La mise en place de la ZPM du Banc-des-Américains est certes une étape de plus dans la protection des milieux marins québécois, mais il reste beaucoup de travail à faire pour atteindre l’objectif du gouvernement du Québec, soit protéger 10 % de ceux-ci d’ici 2020. À l’heure actuelle, le taux de protection atteint à peine 1,9 %.
« Avec une entente de collaboration Canada-Québec sur les aires marines protégées maintenant signée et plusieurs beaux projets en cours, nous avons bon espoir de voir le Québec et le Canada respecter leurs engagements d’ici la fin de 2020 », a toutefois fait valoir mercredi Alain Branchaud, biologiste et directeur général de la SNAP Québec.
Chose certaine, le type de protection annoncé pour le Banc-des-Américains est beaucoup plus strict que les « refuges marins » mis en place au cours des derniers mois par le gouvernement Trudeau, notamment dans la portion québécoise du golfe du Saint-Laurent. Ces refuges, établis pour permettre au Canada de rattraper son important retard en matière de protection des milieux marins, ne sont toutefois pas pris en compte par le Québec.
Il faut dire qu’ils se résument à protéger des coraux et des éponges de mer, tout en laissant la porte ouverte à la quasi-totalité des activités humaines, dont l’exploration pétrolière.
L’aire marine protégée du Banc-des-Américains est donc le seul endroit, à travers la totalité du golfe du Saint-Laurent, « à interdire de façon permanente toute activité pétrolière et gazière », a souligné M. Branchaud.
Projets de protection au Québec :
Estuaire du Saint-Laurent
Le gouvernement du Québec et le gouvernement fédéral ont déjà convenu d’entamer une consultation en vue de la mise en place d’une aire de protection marine dans l’estuaire du Saint-Laurent. Un projet existe déjà depuis 1998 sous la forme d’un « site d’intérêt » de 6000 km², dans le but de bonifier la protection de l’habitat essentiel du béluga.
Îles de la Madeleine
Il s’agit du projet le plus important dans les eaux québécoises, avec une aire d’étude de 17 000 km² englobant tout l’archipel. À lui seul, ce projet pourrait permettre au Québec d’atteindre son objectif de 10 % de protection des milieux marins. Présenté pour la première fois en 2004, il ne sera vraisemblablement pas achevé avant 2020.
Source : Le Devoir – Publié le 7 mars 2019
Photo de une : Pixabay