Les scientifiques américains qui étudient la baleine noire de l’Atlantique Nord ont confirmé jeudi la naissance d’un quatrième baleineau pour cette saison des naissances, une bonne nouvelle pour cette espèce en voie de disparition. Mais le jeune cétacé a déjà été « sévèrement » lacéré par une hélice de bateau, a indiqué l’Agence américaine d’observation océanique et atmosphérique (NOAA).

En publiant les photos du baleineau et de sa mère nageant près des côtes de l’État américain de la Géorgie, la NOAA a fait valoir que les lacérations infligées par une hélice au jeune mâle, « âgé d’à peine quelques jours », sont « préoccupantes, en raison de la sévérité et de l’emplacement des blessures ».

La NOAA n’a pas précisé jeudi si ce baleineau est condamné, mais elle a émis des doutes sur ses chances de survie. L’organisme a toutefois rappelé que les femelles accompagnées de jeunes passent le plus clair de leur temps près de la surface, ce qui les rend particulièrement vulnérables aux collisions avec des navires le long de la très achalandée côte est américaine.

Les femelles baleines noires donnent habituellement naissance à leur baleineau entre fin novembre et début mars, essentiellement au large des côtes des États de la Géorgie et de la Floride.

Faible reproduction

Cette saison de mises bas 2019-2020 a déjà donné un total de quatre baleineaux. Ce chiffre se situe nettement sous la moyenne des dernières années, exception faite de la saison 2017-2018, au cours de laquelle aucun baleineau n’avait vu le jour. Sur la période 2007-2017, la moyenne annuelle était de 18 baleineaux, avec des pointes à 22 en 2013, 22 en 2011 et 39 en 2009.

Selon le North Atlantic Right Whale Consortium (NARWC), qui regroupe des scientifiques canadiens et américains, le taux de reproduction a nettement reculé au cours des dernières années, si bien que « les faibles naissances chaque année ont éliminé la capacité de la population à croître et faire face à la mortalité causée par les humains ».

Selon les chercheurs du New England Aquarium, il est possible, dans certains cas, que des femelles qui ont subi un empêtrement dans des engins de pêche ne soient pas en mesure de se reproduire, en raison des répercussions importantes sur leur condition physique.

« Beaucoup de femelles peuvent être incapables d’accumuler assez de graisse pour réussir à tomber enceintes ou mener une grossesse à terme en raison de possibles réductions de la disponibilité de la nourriture et d’un effort accru pour trouver de la nourriture », souligne aussi le NARWC.

Or, insistent les spécialistes de l’espèce, chaque naissance est importante, puisque la population totale avoisine à peine les 400 individus (dont seulement une centaine de femelles en âge de se reproduire), alors qu’on comptait près de 500 baleines noires de l’Atlantique Nord en 2010. Ce nombre avait été atteint grâce à des mesures de protection importantes mises en place dans les eaux américaines, dont des modifications des routes de navigation et des règles pour la pêche commerciale ainsi qu’un système de surveillance.

Il faut dire qu’on ne comptait que 275 individus au début des années 1990. Il s’agissait donc d’un énorme succès de conservation, puisque le rythme de reproduction de la baleine noire est lent. La femelle peut, au mieux, donner naissance tous les trois ans, et ce, une fois qu’elle a atteint l’âge de 10 ans.

Nombre de disparitions record

Ce cétacé particulièrement vulnérable aux collisions avec les navires et les empêtrements dans les engins de pêche a par ailleurs connu des épisodes de disparitions record depuis 2017, essentiellement dans les eaux du Canada. En 2017, pas moins de 17 baleines noires adultes avaient été retrouvées mortes, dont 12 dans les eaux canadiennes. Un total de 10 baleines noires sont mortes en 2019, dont une femelle qui s’était empêtrée à au moins quatre reprises en 15 ans.

Ces disparitions de baleines noires, qui compromettent la survie de l’espèce, ont amené le gouvernement fédéral à mettre en place des mesures de gestion des pêches, de ralentissement des navires et de surveillance aérienne dans le golfe du Saint-Laurent depuis 2017.

« L’avenir continue de s’assombrir pour la baleine noire de l’Atlantique Nord, une espèce en voie de disparition et en déclin depuis 2010. Elle est victime d’empêtrement dans des engins de pêche (cordages et casiers), de collisions avec des embarcations et de la détérioration de son environnement », soulignait néanmoins le site d’information Baleines en direct, produit par le Groupe de recherche et d’éducation sur les mammifères marins, dans son bilan 2019 sur la situation de l’espèce.

Source : Le Devoir – Publié le 10.01.2020
Photo de une : Wikipedia

 

Loading...