Un chasseur de phoque des Îles-de-la-Madeleine a été attaqué et sérieusement blessé par un phoque gris sur l’île de Pictou, au large des côtes de la Nouvelle-Écosse, plus tôt cette semaine.
Alexis Boudreault et neuf autres chasseurs se trouvaient sur l’île en fin de journée, mais seulement quatre d’entre eux étaient munis d’un hakapik – le gourdin muni d’une tête de marteau et d’un crochet traditionnellement utilisé pour la chasse au phoque – puisque les six autres avaient apparemment été jugés non conformes par des agents de Pêches et Océans Canada.
M. Boudreault dit qu’il était donc sans défense quand le mâle de 225 kilos l’a attaqué mardi après-midi.
Pêches et Océans Canada a été avare de commentaires, mais a réfuté par courriel les propos de M. Boudreault: «Le MPO confirme que les agents des pêches n’ont pas confisqué les hakapiks non conformes aux chasseurs de phoque cette semaine à l’île Pictou et ne divulguera aucune autre information sur cette situation pour le moment.»
«J’ai voulu reculer, a raconté M. Boudreault à La Presse canadienne. Habituellement un phoque ça peut donner un coup, ça avance d’un pied pour protéger son territoire, mais cette fois-là, exceptionnellement le phoque a chargé. Il n’a pas arrêté. J’ai glissé sur la glace en voulant me retourner, il m’a saisi la jambe (gauche) et il m’a carrément fait passer par-dessus lui.»
Les autres chasseurs n’ont pas été en mesure d’intervenir à temps pour empêcher l’attaque, mais ils ont ensuite pu repousser l’animal qui est parti rejoindre ses congénères.
«C’est beau sur les photos, quand on voit les blanchons sur la banquise, mais ça n’a rien à voir du tout, ça a des dents et puis ça mord, a dit M. Boudreault. C’est une anecdote, mais ça prouve qu’il faut que tu respectes cet animal-là.»
Les chasseurs avaient heureusement en leur possession une trousse de premiers soins. Le capitaine qui accompagnait le groupe, Denis Éloquin, a communiqué par radio avec la Garde côtière canadienne, qui est arrivée sur place environ deux heures plus tard pour évacuer l’homme de 29 ans vers un hôpital de Charlottetown, sur l’Île-du-Prince-Édouard.
L’incident s’est produit vers 16 h 30 et M. Boudreault était à l’hôpital à 20 h 30, selon le capitaine Éloquin.
Ses blessures ont nécessité 26 points de suture et il a reçu son congé tôt mercredi matin.
«Quand tu prives un chasseur de ses instruments, ce sont les seules choses que tu as pour te défendre, a rappelé M. Boudreault. En me faisant attaquer par un phoque comme c’est arrivé, si j’avais eu un hakapik, j’aurais pu me défendre, sûrement sans même blesser l’animal. Juste un petit coup sur le bout du nez et l’animal aurait battu en retraite.»
Les phoques gris peuvent courir plus vite qu’un homme sur la terre ferme, a dit M. Éloquin, et ils sont particulièrement agressifs pendant la saison de la reproduction. Si ce n’est pas la première fois qu’il les voit s’en prendre à un chasseur, c’est la première fois en 45 ans de carrière qu’il est témoin d’un incident aussi grave.
C’est aussi la première fois que des agents de Pêches et Océans leur interdisent d’utiliser leur hakapik, affirme M. Éloquin. Selon lui, les crochets des hakapiks jugés non conformes étaient trop longs d’à peine un centimètre et on s’affairait à les modifier à bord du bateau quand le phoque a attaqué.
«C’est un manque de jugement de la part des agents (de Pêches et Océans Canada) et tu vois que la sécurité est très importante et je pense que c’est à ça qu’il va falloir faire attention les années à venir. C’est vraiment la sécurité » , a dit M. Boudreault.
«Ce sont deux jeunes agents. Il y a peut-être eu un manque d’expérience de leur part. Je ne veux pas juger, mais je pense qu’ils auraient pu avoir une meilleure façon d’interagir avec nous. C’est un accident qui aurait pu être évitable pour une histoire de (quelques) millimètres. Il y a des choses à remettre sur la table et à reparler. Faudrait qu’il y ait des modifications dans les années à venir, parce que travailler comme ça, c’est pas plaisant pour personne.»
Le crochet sert normalement à tirer l’animal après sa mort, a expliqué M. Éloquin. Un chasseur qui tombe à l’eau peut aussi l’utiliser pour se sortir du pétrin. Les anomalies constatées par Pêches et Océans Canada étaient «insignifiantes», selon lui.
Pêches et Océans Canada a affirmé que lors de la chasse au phoque, les agents des pêches «mettent en application le Règlement sur les mammifères marins qui régit cette activité commerciale».
«Rappelons qu’il est de la responsabilité des pêcheurs de se conformer à la réglementation, notamment pour leurs équipements, et de s’assurer de la sécurité de leur équipage», a ajouté le ministère dans le courriel envoyé à La Presse canadienne.
Source : lavoixdelest.ca, le 31.01.2020
Photo :