Quand Erin Moreland a entrepris de devenir chercheuse en zoologie, elle s’imaginait passer sa journée assise sur une falaise, à dessiner phoques et autres mammifères marins, afin de comprendre leurs habitudes et ainsi mieux protéger leurs habitats.

A sa grande surprise, Erin Moreland s’est retrouvée coincée devant un écran d’ordinateur, cliquant sur des milliers de photographies aériennes de glace flottante, cherchant des signes de vie animale dans les eaux de l’Alaska, à l’extrême nord-ouest des Etats-Unis. Le tri par son équipe de chaque cliché, comparable à la recherche d’une aiguille dans une botte de foin, était si chronophage que les résultats de leur recherche étaient déjà dépassés dès leur publication.

« Il doit y avoir une meilleure façon de procéder », se souvient-elle avoir pensé. « Les scientifiques devraient être libérés de ce type de tâches pour contribuer davantage à l’étude des animaux et aux défis qu’ils rencontrent ».

Il existe une meilleure façon de procéder, c’est certain ! L’idée a germé, de façon assez inattendue, lorsqu’Erin Moreland observait le paysage depuis la fenêtre de son bureau au Marine Mammal Laboratory de la NOAA à Seattle et regardait l’autre rive du lac Washington, en direction du siège de Microsoft. Elle était convaincue qu’il y avait une solution technologique à sa frustration, mais ne connaissait personne ayant les bonnes compétences pour l’aider.

Tout a changé le jour où, participant à une réunion municipale, elle entend deux inconnus discuter d’Intelligence Artificielle et se joint à leur conversation pour évoquer son travail et ses besoins. L’un d’eux la met ensuite en contact avec Dan Morris du programme AI for Earth de Microsoft. Ce dernier lui conseille de partager son défi au prochain Hackathon organisé par Microsoft, un concours d’une semaine où développeurs de logiciels, programmeurs et ingénieurs collaborent sur différents projets. Quatorze ingénieurs de Microsoft se sont alors portés volontaires pour trouver une solution à son problème.

« Dans l’univers de la conservation de la faune, de nombreux scientifiques prennent du temps à réaliser des tâches répétitives telles qu’examiner des images et des sons », explique Dan Morris. « Les équipements positionnés à distance, nous permettent de collecter toute sorte de données mais les scientifiques doivent trouver des solutions pour bien les utiliser. Annoter des images pendant un an est une mauvaise utilisation de leur temps et les réponses à leurs problématiques arrivent souvent trop tardivement ».

L’idée d’Erin Moreland n’était cependant pas aussi simple à régler qu’une analyse rapide pouvait le laisser penser. Bien qu’il existe de nombreux modèles pour reconnaître les personnes sur les images, aucun – jusqu’à présent – n’était destiné à trouver de phoques, en particulier en temps réel sur des photographies aériennes. Toutefois, les centaines de milliers d’exemples que les scientifiques de la NOAA avaient classés dans les enquêtes précédentes ont aidé les équipes Microsoft, qui les ont utilisés pour former des modèles d’IA à reconnaître quelles photographies et quels enregistrements contenaient des mammifères et lesquels n’en contenaient pas.

« Un des défis était l’ampleur de la tâche : il y avait 20 téraoctets de données d’images de glace à analyser. Travailler sur un ordinateur portable avec autant de données n’est vraiment pas idéal », précise Dan Morris. « Nous avons transféré quotidiennement des disques durs entre Seattle et notre siège de Redmond pour y parvenir. Mais le cloud permet de travailler avec toutes ces données et de former des modèles d’IA. C’est grâce à Azure que nous avons pu réaliser ce travail ».

C’est ainsi qu’elle et ses collègues scientifiques de la National Oceanic and Atmospheric Administration (NOAA) vont, dès l’arrivée du printemps prochain, utiliser l’intelligence artificielle pour surveiller les bélugas en voie de disparition, les phoques menacés ou encore les ours polaires, et réduire ainsi le temps nécessaire à l’obtention des données utiles à la protection des animaux.

Les équipes entraînent des outils d’IA pour distinguer, par exemple, un phoque d’un rocher dans une image, ou le chant des baleines du bruit émis par une drague. Cela leur permet ainsi de mieux comprendre le comportement de ces mammifères pour les aider à survivre dans un contexte où la fonte des glaces et l’activité humaine s’intensifient.

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Publié le 12.03.2020
Photo de une : Pixabay

 

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