Les exemples de collaboration entre humains et dauphins sont nombreux. Une question demeure : qui cherche à apprivoiser l’autre ?

Été 1804. Napoléon observe les côtes anglaises depuis le camp de Boulogne. Il caresse le rêve d’envahir l’Angleterre. Une légende lui prête l’idée d’avoir voulu se faire aider par des dauphins… De source plus sûre, des dauphins ont bien été enrôlés comme auxiliaires militaires. L’armée américaine a dressé des dauphins pour détecter des mines sous-marines et repérer la présence de plongeurs ennemis. Elle les utilisera lors de la guerre du Viêt Nam et durant la guerre contre l’Irak en 2003. Un programme similaire se poursuit en Russie.

Loin de ces visions belliqueuses, les dauphins ont aussi été mobilisés à des fins pacifiques. Dans l’Antiquité, on leur prêtait la faculté de guider les bateaux égarés dans la tempête ou celle de porter secours aux naufragés. Sur la côte de Mauritanie, les pêcheurs Imraguens pêchent depuis plus de quatre siècles avec une population de dauphins qu’ils appellent en frappant la mer à coups de bâton. L’arrivée des dauphins pousse vers les filets des bancs de poissons. Hommes et dauphins partagent alors les prises.

Quel animal marin peut se targuer d’une image aussi positive que le grand dauphin, de son nom scientifique Tursiops truncatus ? Sociable, intelligent, sensible, curieux, le grand dauphin est un mammifère, un cétacé de deux à quatre mètres, vivant en groupes d’une douzaine d’individus.

Descendant d’un ancêtre terrestre qui a amorcé un retour vers le milieu aquatique il y a 55 millions d’années, les dauphins se sont parfaitement s’adaptés aux contraintes de l’environnement marin. Ils sont des champions de la nage, capables d’atteindre la vitesse de 60 km/h. Au large, ils plongent jusqu’à 200 mètres de profondeur. Leurs yeux leur permettent de voir aussi bien dans l’air que dans l’eau, et jusque dans une quasi obscurité. Pour se repérer ils sont équipés d’un sonar haute fréquence, aussi performant que le radar des chauves-souris.

Quoique leurs ancêtres aient divergé depuis plus de 70 millions d’années, leurs systèmes de détection des proies par écholocation présentent une convergence inattendue. Pourtant issus de trajets évolutifs totalement distincts, dauphins et chauves-souris disposent de la même protéine, la prestine, qui accroît leur sensibilité auditive. Étonnant !

Qui approche qui ? 

En plus d’organes des sens perfectionnés, le dauphin est doté d’un gros cerveau dont les circonvolutions sont aussi denses que les nôtres. Cela nous a fasciné, surtout au fur et à mesure que l’on découvrait ses capacités de communication, un véritable langage. L’addition de ces caractéristiques fait que les dauphins affichent des capacités d’apprentissage étonnantes qui nous ont poussé à les apprivoiser… Quoi que…

Baie de Banyuls à la fin des années 1980. Une femelle dauphin avait l’habitude d’entrer dans la baie. J’ai une anecdote personnelle à son sujet. Un matin, à la fin d’une plongée, après avoir posé bouteille et détendeur, je me prélassais en surface lorsque ce dauphin est venu me voir, se collant à moi sans que j’aille à sa rencontre et cherchant manifestement le contact. Cette expérience émouvante m’a laissé l’impression que ce sont les dauphins qui apprivoisent les humains et non l’inverse. Quelle tristesse qu’aujourd’hui encore, les grands dauphins soient tués par les pêcheurs norvégiens ou japonais.

Source : France Culture – Publié le 27.10.2020
Photo de une : Wikimedia

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