Des chercheurs veulent «apprendre» à un ordinateur à reconnaître le cri des épaulards résidents afin de mettre au point un système d’avertissement pour empêcher les navires de frapper mortellement ces bêtes menacées au large des côtes de la Colombie-Britannique.

Steven Bergner, associé de recherche en informatique de l’Université Simon-Fraser, gère une base de données de sons captés 24 heures par jour par un réseau d’hydrophones de la mer des Salish.

Les biologistes marins identifieront les sons de différentes espèces de cétacés, comme les baleines à bosse et les baleines itinérantes, afin de les différencier des autres bruits comme les vagues et les navires, explique-t-il. L’apprentissage automatique ou l’intelligence artificielle aidera à détecter la présence de ces mammifères marins grâce aux données.

« Cette [information] passe par un autre système qui décide ensuite si un avertissement doit être lancé au pilote du navire », raconte M. Bergner.

L’objectif est de détecter automatiquement le chant des épaulards et d’envoyer des alertes en temps réel aux navires pour leur permettre de ralentir ou de changer de cap des heures avant que ces bêtes ne soient sur leur chemin, ajoute-t-il.

Les épaulards vivant le long de la côte ouest sont classés en trois groupes nommés J, K et L, chacun ayant son propre dialecte et des chants différents des autres.

M. Bergner collabore avec des collègues de l’Université Dalhousie à Halifax et de l’Université Carleton à Ottawa pour mettre au point les outils d’apprentissage automatique. Des scientifiques et le projet Orcasound contribuent également à la recherche.

Le projet a reçu un financement de 568 000 $ de Pêches et Océans Canada.

Le programme s’appuie sur les travaux de Ruth Joy, écologiste statistique de l’Université Simon-Fraser, qui dirige deux projets de recherches sur les épaulards qui devraient être achevés d’ici mars 2022.

Mme Joy dit que les hydrophones situés à côté des voies de navigation dans la mer des Salish collecteront des informations pour aider à prédire la direction que les épaulards sont les plus susceptibles de suivre en fonction de leurs schémas typiques.

« Cela donnera une sorte de projection pendant trois ou quatre heures, explique-t-elle. Perdre une seule baleine est vraiment inadmissible. À ce stade, il ne nous en reste plus que 74. Nous ne voulons certainement pas que les voies de navigation deviennent un endroit où les épaulards sont en danger. »

Il est difficile de savoir combien d’épaulards ont été frappés par des navires, reconnaît Mme Joy.

Elle garde en mémoire la mort de l’un des cétacés qui s’est échoué sur les rives de la Sunshine Coast, en 2017.

« La nécropsie a laissé entendre qu’il était mort d’un traumatisme contondant », raconte-t-elle. « Nous ne savons pas ce qui l’a heurté, si c’est un bateau de plaisance à grande vitesse, un traversier ou un navire commercial. On ne les retrouve pas nécessairement lorsqu’ils sont heurtés. Ils disparaissent tout simplement. Seule leur carcasse peut confirmer la cause de leur mort. »

Les résultats du projet seront partagés avec la communauté de scientifiques pour potentiellement sauver différentes populations de baleines ailleurs dans le monde, dit Mme Joy.

Ses recherches ont conduit le port de Vancouver à lancer un programme en 2016 pour réduire le bruit sous-marin dans les principales zones d’alimentation des épaulards résidents du sud.

De juin à octobre, on a demandé aux exploitants de remorqueurs de ralentir une fois que la présence des épaulards résidents du sud est confirmée dans le cadre d’un effort de collaboration avec le secteur de la navigation commerciale.

Si les épaulards se dirigent généralement vers le sud en hiver, des membres des groupes J, K et L ont été repérés dans la mer des Salish en Colombie-Britannique, plus tôt ce mois-ci avant de se rendre dans la région de Puget Sound à Seattle, indique Mme Joy.

Source : L’actualité – Publié le 13.12.2020
Photo de une : Geograph

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