AYUKAWA (Japon) – L’entreprise de Minoru Ito, vétéran de la pêche à la baleine, avait survécu aux campagnes et pressions internationales appelant à y mettre fin. Mais une menace bien plus grave, sous la forme d’un tsunami dévastateur, a déferlé le 11 mars.
Patron de Ayukawa Whaling, l’unique société de pêche à la baleine du petit port du même nom, Minoru a dû annuler sa prochaine campagne en avril, alors que la vague géante qui a suivi le séisme de magnitude 9 a détruit non seulement ses stocks de viande mais aussi ses bateaux. Le patron-pêcheur de 74 ans et ses 28 employés ont tous eu la vie sauve, mais la mort dans l’âme il a dû les licencier, l’énorme dette que le tsunami lui a léguée ne lui laissant pas le choix. Le bilan de l’une des pires catastrophes naturelles de l’histoire de l’archipel a dépassé vendredi les 10.000 morts confirmés. Le tsunami a détruit une grande partie de la flotte et des ports de pêche de la côte nord-est sur le Pacifique. Dans le seul village de Ayukawa, sur 1.400 habitants, au moins 5 personnes sont décédées. Mais le bilan pourrait monter, les opérations de recherches des corps ayant juste débuté. « C’est la pire crise que nous ayons jamais connue », confie le vieil homme. Sur les lieux de son ancien entrepôt ravagé, la vague monstrueuse a projeté pêle-mêle des morceaux de viande de baleine, des éclats de bois, des bouées ou encore des poissons morts. Malgré tout, il conserve l’espoir de pouvoir repartir à la chasse au cétacé dès l’automne, à condition que l’aide des autorités soit suffisante. Tokyo soutient en effet depuis longtemps financièrement sa flotte baleinière. Les bateaux japonais capturent chaque année plusieurs centaines de baleines au nom de la « recherche scientifique », une pratique tolérée par la Commission baleinière internationale (CBI) qui interdit la chasse commerciale au cétacé depuis 1986. Une grande partie de la viande, destinée à la consommation, est ensuite vendue bon marché sur les étals nippons. L’Australie a saisi en juin la Cour internationale de justice afin d’obliger le Japon à mettre fin à cette chasse. Les autorités japonaises affirment que cette pêche fait partie intégrante de la culture nippone. A la mi-février, le Japon avait rappelé prématurément sa flotte baleinière de l’Antarctique à cause du harcèlement mené par l’association environnementale Sea Shepherd. « La pêche baleinière représente une industrie importante pour le pays », assure Tatsuya Nakaoku, un responsable de l’Agence japonaise des pêches. « Nous ferons le maximum pour que les pêcheurs, y compris les baleiniers, puissent continuer à travailler ». « La pêche à la baleine est toute ma vie. Si quelqu’un me prend ça, il ne me restera plus rien », prévient de son côté Ryoetsu Okumi, 70 ans. A Ayukawa, la pêche au cétacé remonte au début du XXe siècle, trois armements y prospéraient alors. L’activité déclina durant la 2e Guerre mondiale mais elle reprit juste après alors que le Japon, battu et occupé par les Américains, faisait face à une pénurie alimentaire. Avant le tsunami, le village pêchait encore plus de 80 rorquals et autres baleines chaque année. Greenpeace qui lutte pour la fin de cette pratique, a réaffirmé son opposition à la pêche tant commerciale qu’à des fins « scientifiques », que ce soit pour la pêche le long des côtes ou pour celle hauturière, toutes deux autorisées pour la flotte japonaise. « Mais nous espérons que tous les survivants, y compris les baleiniers, vont vite se remettre », a indiqué Junichi Sato, membre de l’0NG, soulignant cependant être beaucoup plus attentif aux fuites radioactives à la centrale endommagée de Fukushima. (©AFP / 26 mars 2011 11h32)
Source : romandie.com (26.03.11) Autres liens en rapport : Nouvelles du Japon et des dauphins de Taiji… Tsunami au Japon : un marsouin retrouvé au milieu d’une rizière… Voir également notre dossier complet : La chasse baleinière…